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Réinvestigation

Sur la base de sources publiques, retour sur des affaires restées énigmatiques.


L'ASSASSINAT DE JOHN FITZGERALD KENNEDY (VII)

Publié par Riparius sur 6 Avril 2022, 13:40pm

 

4) L’entourage d’Oswald et sa participation directe ou indirecte à l’événement du 22 novembre :

Buell Wesley Frazier. Après avoir quitté Huntsville (ville du Texas située 250 km au sud de Dallas), arrive à Irving, en septembre 1963, pour habiter chez sa sœur, Mrs Linnie Randle, et prendre son emploi au TSBD, qu’il occupe encore, lorsque le FBI l’interroge, le 18 mars 1964. A deux maisons près, il est ainsi devenu voisin des Paine. Dans le cadre de son service militaire, commencé en août 1965, il est affecté en Europe, à partir d’octobre, pour une période de sept mois, avant d’être affecté, jusqu’en août 1967, dans la région de Seattle, sur la base de Fort Lewis, lieu majeur d’embarquement pour le Vietnam.

Mrs et Mr Paine. Travaillant dans la conception d’hélicoptères Bell, à Hurst (dans la banlieue ouest de Dallas), Michael Paine est un employé indirect du Ministère de la Défense. Sa mère et Allen Dulles, Directeur de la CIA de 1953 à 1961, avaient chacun comme meilleure amie une amie commune, qui avait travaillé sous la direction de Dulles, à l’OSS, pendant la 2nde guerre mondiale (Dulles fut démis de ses fonctions de Directeur de la CIA par le président Kennedy et sera l’un des membres de la commission Warren). Issue d’une famille qui aura compté, au moins, trois employés de la CIA (son père, sa sœur et le mari de cette dernière : le premier, à partir de 1964, en tant que conseiller régional aux assurances, à l’AID, antenne de la CIA, où travaillait déjà le troisième, la seconde, en tant que psychologue, depuis déjà huit ans, en 1963), Ruth Paine – née Ruth Avery Hyde – en fut probablement, elle-même, un. Deux mois avant l’attentat, elle séjournait chez sa sœur et son beau-frère, dans la région de Washington. Elle effectuera, ultérieurement, des missions de renseignement étasunien, sous couverture d’aide humanitaire et d’évangélisation, en Amérique centrale. Descendante d’une lignée de pasteurs calvinistes, dont son père presbytérien, elle appartenait, tout comme son mari (et tout comme Richard Nixon, battu par Kennedy, aux élections de 1960), à la congrégation des Quakers, sorte de secte para-protestante qui compte parmi les congrégations protestantes traditionnellement les moins bien disposées à l’égard du catholicisme, la religion de Kennedy. Fondée en Angleterre au XVIIème siècle, la secte y fut persécutée, notamment parce qu’elle jugeait l’église anglicane encore trop catholique, et beaucoup de ses membres durent s’exiler. Bien que William Penn, son promoteur dans les colonies britanniques d’Amérique, de surcroît fondateur – sur concession territoriale tarifée du roi d’Angleterre – de la province de Pennsylvanie (ancêtre de l’Etat éponyme dont est originaire Ruth), et qui passe pour l’un des inspirateurs de la constitution des Etats-Unis, eût d’abord accordé juridiquement, en 1701, aux catholiques, à égalité avec les membres des autres religions, la tolérance religieuse et la liberté de conscience (dont, du reste, lui-même venait de bénéficier, par indulgence du roi catholique Jacques II, lors d’un long séjour en Angleterre, jusqu’à la mort du roi), il finit par s’inquiéter de l’essor pris par le catholicisme dans la province et par la soumettre à un traitement discriminatoire (entre autres, en produisant des chiffres de son recensement très inférieurs à la réalité). Cet aperçu historique nous ayant permis de mieux situer les Paine, revenons précisément à eux : séparés depuis peu (certains observateurs parlant, à ce propos, de simple « éloignement amical ») – Mr Paine vivant désormais à Grand Prairie, quand sa femme demeure à Irving, tous deux, donc, dans la banlieue ouest de Dallas, à l’instar de Lee Harvey Oswald – les deux époux n’avaient, pour autant, pas perdu contact : ainsi s’étaient-ils revus, à Irving, le dernier week-end avant l’attentat, pour fêter l’anniversaire de leur fille. Dans son rapport daté du 11 décembre 1963, l’agent du FBI James Hosty note que Michael Paine lui a déclaré s’être réconcilié avec sa femme, le 10 décembre, et résider désormais couramment au même domicile qu’elle, à Irving. Un autre rapport nous semble également se passer de commentaire : celui des policiers Rose, Stovall et Adamcik relatant leur visite effectuée, en compagnie des shérif-adjoints Weatherford, Walthers et Oxford, au domicile des Paine, le 22 novembre, vers 15 h. 30 : notamment la façon qu’a Michael Paine, d’abord absent du domicile, de s’y présenter, un quart d’heure après l’arrivée des six enquêteurs, en demandant à sa femme, avec l’air de rien, si elle n’aurait pas besoin d’aide ; puis l’arrivée, un autre quart d’heure plus tard, de la sœur de Buell Frazier, Mrs Randle, qui habitait dans la même rue, et qui, d’elle-même, se mit à parler du grand paquet qu’aurait transporté Oswald, le matin (Ajoutons que, le lendemain matin, Mrs Roberts, la logeuse d’Oswald – qui connaissait bien Ruby et dont la sœur, Bertha Cheek, rendit visite à son cabaret, le 18 novembre, et reçut une offre d’emploi de lui, le 21, et enfin, qui hébergeait, en voisin de chambre d’Oswald, John Carter, un ami d’un proche ami et employé de Ruby, Wanda Joyce Killam, comme l’a établi le HSCA – a pris soin de regarnir les fenêtres de la chambre d’Oswald de nouvelles tringles à rideau et de nouveaux rideaux – la police de Dallas étant censées avoir tordu les anciennes tringles, la veille, selon un rapport du FBI daté du 28 mars 1964, qui, par ailleurs, attribue le regarnissage, tout au moins la décision de regarnir, à la propriétaire Mrs Johnson, qui souhaitait profiter de l’occasion pour changer les rideaux, et qui déclare qu’Oswald ne lui avait jamais exprimé l’intention de changer les tringles – Mrs Roberts laissant ainsi soupçonner qu’elle aménage les lieux pour de futures visites d’enquêteurs et surtout de journalistes, dans le but de ne pas ruiner la thèse qu’Oswald n’avait pas besoin d’apporter de tringles, au contraire de ce qu’il était censé avoir déclaré à Frazier – nonobstant que demeure très vraisemblable que la pièce était initialement garnie de rideaux, étant donné sa très grande exposition à la lumière du jour et aux regards extérieurs. Ayant pourtant reçu de Mrs Roberts la demande de ne pas le faire, un reporter photographe, qui était présent, a saisi, à leur insu, la scène d’une Mrs Roberts et de son mari montés, tour à tour, sur le lit pour atteindre l’emplacement de la tringle, une seule et même tringle courant au-dessus des trois fenêtres nord, deux autres fenêtres ouvrant le mur est – cf. WCD 705, Roffman, « Presumed guilty », p. 85, et HSCA Report, p. 148) ; enfin, la découverte, dans le garage, de la couverture dans laquelle aurait été rangé le Mannlicher-Carcano qu’aurait possédé Oswald, et qui aurait eu quasiment conservé la forme du fusil, du fait des ficelles qui l’enserraient encore et qui n’avaient pas été dénouées… couverture dont Mrs Paine dira, devant la commission Warren, qu’elle était posée au sol – comme le mentionnait déjà le rapport de Stovall – et que, alors qu’elle dirigeait les enquêteurs, elle marcha dessus, par mégarde, n’ayant jamais su, auparavant, ce qu’elle contenait… Le procureur Jim Garrison écrit : « Mes recherches sur la famille Paine furent vaines : tout ce qui les concernait avait été classé secret par le gouvernement. Qu’avait donc cette famille de si particulier pour bénéficier d’un traitement aussi protecteur ? Seule une collaboration entre la CIA et les Paine justifierait de telles mesures de sécurité… » (« JFK, affaire non classée », p. 57). Déjà, dans une lettre datée du 23 octobre 1964, adressée au conseiller juridique de la commission Warren, J. Lee Rankin, J. Edgar Hoover, directeur du FBI, recommandait instamment de ne pas rendre publics « certains rapports et mémos [du FBI] ayant trait à Michael et Ruth Paine, et George et Jeanne de Mohrenschildt (…) [ce] qui pourrait avoir de sérieuses répercussions sur la commission » (cf. Douglass, « JFK et l’indicible », p. 260).

George de Mohrenschildt. Immigré russe, ancien collaborateur des services de renseignements français et, momentanément, de ceux allemands, aux Etats-Unis, pendant la 2nde guerre mondiale, puis exploitant pétrolier et agent ou collaborateur de la CIA, George de Mohrenschildt était, selon Jim Garrison, un homme manipulé par des services de renseignement étasuniens, parfaitement ignorant du sort réservé à Oswald et Kennedy et profondément affecté par leur mort (cf. ibid., p. 290-291). Au printemps 1976 (période où se met en place le HSCA), à la suite d’une attaque liée à une bronchite chronique, il est mis sur la voie d’un médecin qui lui administre un traitement douteux altérant son état psychique et le conduisant, notamment, à faire une tentative de suicide, traitement qu’il décide d’arrêter, en fin d’année. Après un séjour-refuge en Europe, au premier trimestre 1977, il occupait, depuis deux semaines, le domicile d’une belle-sœur, en Floride, lorsqu’il y meurt, fin mars. Quelques heures avant sa mort, il avait eu, dans un hôtel, un entretien avec le critique Edward Jay Epstein, auquel il avait confié qu’il avait été incité à rencontrer Lee Harvey Oswald, en 1962, par un agent de la CIA en poste à Dallas, J. Walton Moore. Pendant cet entretien, un enquêteur du HSCA laissait, à son domicile, sa carte de visite à sa fille, en annonçant qu’il repasserait le voir, en fin de journée. Le jury de médecine légiste conclura rapidement que sa mort était un suicide, lequel n’en sera pas moins qualifié de « très étrange » par le directeur d’enquête. Un magnétophone que la propriétaire des lieux avait laissé en marche pour enregistrer un feuilleton télévisé, en son absence, a enregistré une sonnerie d’alarme qui pourrait n’avoir correspondu à aucune entrée dans le domicile identifiée et justifiée (cf. Marrs, « Crossfire », p. 258-267, Douglass, ibid., p. 109-112 et 259-260, et « George de Mohrenschildt death », sur « The education forum »). C’est après que Mohrenschildt lui eut fait rencontrer les Paine, à Dallas, en février, et eut persuadé ces derniers de l’accueillir et de l’héberger, lui et sa famille, qu’Oswald avait quitté la Nouvelle-Orléans pour Irving, début octobre 1963. Proposition de logement venant des Paine à laquelle Lee fut, d’entrée, réticent, et qui aura lieu, en plusieurs temps : d’abord Marina et son enfant, en avril, qui font ensuite un aller-retour de plusieurs mois à la Nouvelle-Orléans, avant d’être rejoints, début octobre, par Lee, qui, à cette occasion, retrouve Dallas, qu’il avait quitté en avril, après y avoir séjourné, pendant deux mois, avec sa petite famille, sur West Neely Street. De retour à Dallas, il trouve un emploi à durée déterminée au TSBD, à la mi-octobre, sur le conseil de Mrs Paine, d’une façon pour le moins étonnante. Celle-ci lui aurait parlé de l’offre d’emploi dont sa voisine, Mrs Randle (la sœur de Buell Frazier) l’aurait eu mise au courant (ce que celle-ci a ensuite contesté, devant la commission). Alors qu’Oswald passait l’entretien d’embauche au TSBD, le 14 octobre, l’Agence pour l’emploi du Texas, où il s’était inscrit, téléphone chez les Paine, pour lui proposer un emploi à durée indéterminée doté d’un salaire d’un montant d’une fois et demie celui du TSBD, chez Trans Texas Airways ; pour toute réponse, quelqu’un chez les Paine renseigne qu’Oswald est absent et qu’il sera informé de l’offre, à son retour. Le lendemain, l’Agence rappelle pour obtenir la réponse, et est alors informée qu’Oswald a trouvé un emploi et qu’il est au travail. Devant la commission Warren, Marina a laissé entendre qu’il aurait certainement quitté l’emploi du TSBD pour celui de la TTA, s’il avait été mis au courant de l’offre (cf. Douglass, ibid., p. 263-264). Toujours devant la commission, Mrs Paine dira de lui : « Je ne savais pas qu’il était une personne violente, n’avais pas pensé qu’il avait ce trait de caractère, cette possibilité, en lui, ni, absolument, de connexion avec la venue du Président. » « La pensée qu’il était violent et dangereux [lui] traversa l’esprit », lorsqu’il se mit en colère, parce qu’elle avait fait part à l’une de ses propres connaissances du traitement qu’il réservait à sa femme et qui, selon elle, la rendait « malheureuse » : « Mon impression générale n’était pas celle d’un homme qui éclaterait en une soudaine violence marquée (a man who would break out in sudden marked violence). Il se disputait avec sa femme et était franchement déplaisant avec elle. » (Accusation de maltraitance dont on peut douter de la pertinence et que certains ont rapproché d’une possible attirance homosexuelle pour Marina, Ruth Paine ayant, d’ailleurs, ultérieurement elle-même avoué avoir des tendances homosexuelles, mais aussi avoir toujours lutté contre elles et avec succès – cf. son audition par l’ARRB. Pour le reste, on notera que le profil d’homme irascible, voire sujet à des accès de violence, aurait très probablement interdit à Oswald d’être recruté par des services de renseignement, pour remplir, sur une longue période – entre 1957 et 1963 – diverses missions, si ce n’est une seule mission à diverses facettes). Somme toute, le comportement de Mrs Paine demeure ambigu, et pas seulement du fait d’un possible penchant homosexuel, dont on peut, d’ailleurs, aller jusqu’à douter de la réalité, puisque n’ayant pu être qu’un subterfuge (à retardement, c’est-à-dire destiné à une enquête ultérieure) pour servir de couverture au soin extrême qu’elle aurait apporté à Marina, dans le but de la conditionner dans son rapport à son mari, afin, notamment, d’exaspérer et d’isoler celui-ci (Ruth et Marina seront séparées et éloignées par le FBI, dès le soir du 22, et ne se reverront plus que brièvement, en mars 1964, lors d’une phase préliminaire aux auditions de la commission Warren). Le dimanche du dernier week-end avant le 22 novembre, elle cherche à contacter Oswald, par téléphone, pour l’inviter à l’anniversaire de sa fille. Elle prétendra avoir, alors, appris de Mrs Roberts qu’il n’y avait aucun locataire, chez elle, sous le nom de Lee Harvey Oswald. Mais n’a-t-elle pas plutôt cherché à jouer publiquement l’ignorante, sur ce point, dans la perspective des événements prochains ?

Frazier, le 22 novembre. Buell Frazier, qui se rend au sous-sol, quelques minutes après l’attentat, prétendument pour y trouver le nécessaire pour son déjeuner et le consommer, nécessaire que, comme à son habitude, il y avait déposé, avec son manteau, le matin, à son arrivée, n’y serait-il pas plutôt allé indiquer aux tireurs le moment opportun pour traverser le rez-de-chaussée jusqu’à la porte de sortie arrière du bâtiment, et/ou n’y serait-il pas allé récupérer une arme jetée dans la cage ou apportée par les tireurs ? (La coupure de l’alimentation en électricité des ascenseurs a été effectuée, vers 12 h. 50 – au moment précis où le shérif-adjoint Mooney s’apprête à passer du premier étage aux étages supérieurs, en compagnie de Victoria Adams, au moyen de l’ascenseur ouest… et au moment où Frazier se trouve, dans le sous-sol, pendant dix minutes – comme il dit l’avoir constaté à sa montre – soi-disant pour manger, seul, après être resté discuter avec d’autres employés, au rez-de-chaussée, près de l’entrée du bureau de Shelley. S’il n’est pas sûr que cette coupure ait pu être effectuée depuis le sous-sol, bien que certains le soutiennent – ayant, par contre, certainement pu l’être, depuis la console des commandes électriques du bâtiment, située au rez-de-chaussée – aurait-elle permis la récupération d’une arme jetée dans la cage ?) Ou – deuxième hypothèse – n’y aurait-il pas été, malgré lui, le témoin de la présence des tireurs ou d’un complice chargé de récupérer une arme ? Ou encore – troisième hypothèse – sans lien nécessaire avec sa descente au sous-sol, au moment du déjeuner – n’aurait-il pas lui-même transporté le Mannlicher-Carcano, le matin, à l’insu d’Oswald, pour le déposer au sous-sol ? Il aurait fait en sorte d’être en retard à suivre ce dernier, jusqu’au bâtiment du TSBD, afin de pouvoir, au sens propre comme au sens figuré, transporter l’arme, dans son dos. Après 13 h., il s’absente du TSBD, soi-disant pour visiter son beau-père hospitalisé à l’Irving Professional Center. La police aura du mal à l’y retrouver, ce qu’elle fera à 18 h. 45, grâce aux indications fournies par sa sœur, après 16 h., disparition qui semble avoir été la raison principale de son placement en garde à vue. Lors de celle-ci, Fritz l’aurait brusqué, au dire de l’intéressé, pour lui faire avouer qu’il avait participé à l’attentat, avant de le relâcher, puis de le rappeler pour lui faire passer un test polygraphe (détecteur de mensonge), qui est censé n’avoir finalement détecter aucune anomalie (ce qui sera ensuite contesté par des chercheurs, sur la base de documents issus des tests). Quelle que soit l’hypothèse retenue, parmi les trois (la 1ère et la 3ème étant, d’ailleurs, compatibles), il pourrait avoir éprouvé répulsion et remords, après avoir constaté ou soupçonné que son collègue et ami avait été injustement incriminé et châtié, voire aussi – selon la 1ère et la 3ème hypothèses – en constatant que lui-même avait été manipulé pour participer à un attentat contre le Président (Tous deux auraient été éventuellement persuadés qu’ils allaient participer à un simulacre d’attentat contre le Président, duquel celui-ci était censé devoir sortir indemne, mais en ayant dû l’avoir vécu comme un avertissement ; on n’ignorera pas non plus l’hypothèse, quoique peu probable, avancée par J. W. Douglass, selon laquelle, lorsque Arnold le vit dans la salle à manger du TSBD, Oswald aurait été en train d’attendre patiemment des agents du FBI venant arrêter les comploteurs qu’il leur aurait eu préalablement dénoncés – ibid., p. 468) ; constat de manipulation qui l’aurait poussé à faire valoir subtilement l’existence d’une seconde arme, devant la commission Warren. Éprouvant du scrupule, au moment de devoir incriminer Oswald, il aurait choisi une solution intermédiaire : Oswald aurait bien porté un grand sac, mais pas suffisamment grand pour transporter un Mannlicher-Carcano. Devant le HSCA, en revenant quelque peu – dans une déposition pas faite sous serment – sur ses déclarations faites devant la commission Warren, il prolongerait, en fait, sa démarche initiale, en l’améliorant, du point de vue de la thèse officielle : Oswald lui semble toujours avoir porté un sac trop petit pour un Mannlicher-Carcano, mais, pour autant, il l’a observé le transporter, à une distance d’une centaine de mètres, et non plus d’une vingtaine, et d’une façon plutôt distraite. Il reste que la troisième hypothèse implique la difficulté que nous avons déjà mentionnée, dans notre première partie : Oswald aurait pu constater la disparition de son arme du garage des Paine, avant de partir au travail, ce qui, dans la mesure où il était complice de l’attentat (en tant que simple guide et protecteur des tireurs dans le TSBD), aurait pu éveiller, chez lui, des soupçons préjudiciables au bon déroulement du complot. Aussi, conviendrait-il de se rendre à l’hypothèse suivante : le break Rambler qui a ramassé Oswald, devant le TSBD, après l’attentat, aurait bien été celui de Mrs Paine, et se serait rendu sur le parking du TSBD, dans la matinée, après la reprise du travail d’Oswald, avec le Mannlicher-Carcano dans son coffre. Les tireurs n’auraient eu plus qu’à s’y servir, avant d’entrer dans le bâtiment. A l’appui de cette hypothèse, on notera, d'une part, que, à la date du 23 novembre, le laboratoire du FBI de Dallas ne fait état d’aucun sac en papier, qui aurait pu servir à transporter le fusil, mais bien d’une couverture, sans doute celle-là même dans laquelle était emballée l’arme, dans le garage des Paine (cf. Marrs, ibid., p. 427), et que, d'autre part, si, comme nous le verrons, Oswald a bien été averti, par Richard Nagell, dès septembre 1963, qu'il était manipulé au sein d'un complot visant le Président, il n'était sans doute pas disposé à prêter son arme pour tirer contre ce dernier, fût-ce selon un plan de simulacre d’attentat, voire d’autant plus selon un tel plan, qui n’aurait alors pu que lui apparaître comme un simulacre de plan de simulacre d’attentat (cf. sixième partie, p. VIII). Il reste encore l’hypothèse, qu’étaierait l’annonce, en début d’après-midi, de la découverte d’un British Enfield .303 au TSBD, selon laquelle Frazier aurait été, à ce moment-là, soit sous le coup d’un chantage visant à lui faire incriminer Oswald, en lui suggérant de narrer au public la fable du paquet transporté, le matin, par ce dernier – qui ne fait, en effet, son apparition que par la voix de sa sœur, après 16 h. – en échange du retrait de la menace de sa propre inculpation, lui qui était possesseur d’un Enfield .303, soit carrément sous le coup d’une préparation à être substitué à Oswald, en cas de défection de ce dernier au rôle qui lui avait été imparti. Or, l’hypothèse est rendue très improbable, dans le premier cas, par le fait qu’elle impliquerait une totale absence de planification de l’attentat, et, dans les deux cas, par le fait que, dans la soirée, alors que la découverte d’un Mauser est désormais annoncée sur toutes les ondes et qu’Oswald est désormais arrêté, Fritz est censé avoir encore cherché à savoir si Frazier avait participé à l’attentat.

Une étrange histoire autour d’Oswald et du 22. L’arme retrouvée au TSBD pourrait avoir été transportée par Oswald... ou un sosie, un ou deux jours avant le 22, si l’on se réfère au témoignage de Ralph Leon Yates, un employé d’une société frigorifique, qui a rapporté à son collègue Dempsey Jones, dès le 21, et au FBI, le 26, avoir pris en auto-stop, depuis un endroit proche de la sortie de la voie express R.L. Thornton sur Beckley Avenue jusqu’au TSBD, probablement le mercredi 20, à moins que ce ne soit le lendemain (sa mémoire de la date étant restée incertaine), vers 10 h. 30, un homme « identique à Oswald » et portant un paquet de 1,20 m. à 1,30 m. qu’il disait contenir des tringles à rideau et qui, alors que Yates engageait la conversation avec lui sur la visite prochaine de Kennedy, montra de l’empressement à répondre, tout en cherchant à la faire porter sur « la faisabilité de tirer sur le Président depuis un bâtiment, quand il passerait là ». Que le paquet eût contenu des tringles ou qu’il eût contenu un fusil, l’histoire aurait été ensuite transposée au matin du 22, pour faire oublier le témoignage de Yates, qui ne manquait pas de déranger la narration officielle des événements, tout en pouvant paraître l’avoir alimentée, paradoxalement. A priori, on a plutôt tendance à penser que l’homme pris en auto-stop par Yates était un sosie d’Oswald, d’autant plus que le vrai Oswald était censé se trouver déjà au TSBD, lorsque Yates y déposa son passager (ce que le FBI n’est néanmoins finalement pas parvenu à prouver). Il reste que, jusqu’à sa mort, Yates est demeuré sûr et certain d’avoir identifié le vrai Oswald. Quoi qu’il en soit, il est possible, sinon probable, que ce qu’il a vécu, ce matin du 20 (ou 21), s’inscrivait dans le plan d’assassinat du Président ; plan que la visite inopinée d’Oswald à Irving, le soir du 21, pourrait être venue bouleverser, en nécessitant sa modification. Ayant transporté son arme au TSBD, le matin du 20 (ou 21), Oswald n’avait plus de raison d’aller la chercher, le soir du 21 (quoique, à vrai dire, comme nous en tiendrons compte, pour finir, pas non plus de raison de ne pas aller chez les Paine pour faire autre chose) ; auquel cas, il fallait choisir : soit gommer le témoignage d’un seul individu, en l’occurrence, Yates, soit gommer le témoignage d’au moins trois individus : Frazier, Mrs. Paine et Marina Oswald, qui tous trois avaient vu Oswald se rendre chez les Paine, le soir du 21 ; visite qui pourrait bien n’avoir eu qu’un motif affectif et conjugal : se réconcilier avec sa femme et la convaincre de le suivre, dans sa fuite, le lendemain ou les jours suivants (lors de ses interrogatoires, Oswald ayant, du reste, toujours nié que la visite avait pour but de prendre des tringles à rideau et toujours nié avoir parlé de tringles à rideau à Frazier), et visite qu’aucun chef de complot n’aurait pu vraiment prévoir et dont Oswald lui-même n’aurait pas mesuré qu’elle venait enrayer la mécanique du complot dont il avait commencé d’être une pièce essentielle, y compris lors de sa rencontre avec Yates – et ce, qu’il ait joué, avec ce dernier, sciemment et parfaitement, selon une tâche qui lui avait été assignée, ou involontairement, en un moment d’imprudence (que pourrait néanmoins relativiser le fait qu’il aurait été persuadé de participer à un faux attentat), le rôle d’un homme pouvant être suspecté de comploter contre la vie du Président (et ce, bien sûr, au cas où l’autostoppeur pris par Yates n’aurait pas été un sosie) – la seconde hypothèse étant la plus probable, d’autant plus que c’est bien Yates qui s’est trouvé, d’entrée, faire parler son passager, et sur le paquet, au moment où il lui proposait de le ranger à l’arrière du véhicule, et sur la visite de Kennedy. La première solution – consistant à gommer le témoignage de Yates – s’offrait indéniablement comme la plus facile... quoique, rétrospectivement, il y a tout lieu de douter qu’elle l’ait été, comme on s’en convaincra, en lisant le récit détaillé que fait de cet épisode rocambolesque et tragique (notamment pour Yates et sa famille) James W. Douglass, dans son ouvrage déjà cité (p. 454-460) (Douglass pour qui, au demeurant, cette rencontre entre un autostoppeur et Yates, lors de laquelle le premier parla, entre autres, de Ruby, fut un montage de la CIA, tenu en réserve dans la perspective d’incriminer, au besoin, la mafia, en remplacement du tireur solitaire ou des Russes et des Cubains ; épisode que l'auteur traite, d'ailleurs, parallèlement à d'autres similaires, notamment celui survenu, le matin même du 22 novembre, lorsque Julia Ann Mercer vit Ruby en compagnie d'un homme ressemblant à Oswald, en train de déposer un long paquet d'où sortait le bout d'un fusil, au sommet du Grassy Knoll – cf. ibid., p. 350-353 et 464). Autant de considérations qui peuvent suffire à établir qu’Oswald n’a transporté aucun paquet, depuis Irving, le matin du 22, pas même, d’ailleurs, celui de son déjeuner, dont Frazier déclara, devant la commission Warren, que, exceptionnellement, il n’en avait pas emporté, ce jour-là, projetant de l’acheter sur place (ce que corrobore le témoignage de Dougherty, mais ce que contredit une déclaration d'Oswald censée être rapportée par Fritz, dans son rapport). Pour autant, puisque Oswald n’était pas sans pouvoir paraître légitimement avoir eu d’autres raisons d’aller chez les Paine que celle d’aller y chercher son arme, il n’est pas évident que cette visite pût venir concurrencer le transport de l’arme par le véhicule de Yates et, en conséquence, empêcher que la version officielle n’intègre le témoignage de ce dernier. Aussi, la solution pourrait être la suivante : Oswald – le vrai – transportait vraiment des tringles à rideau, lorsque Yates le prit dans son véhicule (Non démonté, le Mannlicher-Carcano mesure 1,02 m., alors que Yates parle d’un paquet de 20 à 30 cm. plus long, dans lequel, certes, le Mannlicher pouvait se fondre), à moins, bien entendu, qu’il ait transporté (peut-être mélangé à des tringles) le fameux second fusil devant servir depuis la fenêtre sud-ouest ; transport qui, par la suite, ne pouvait que concurrencer le transport réellement prévu et réellement effectué du Mannlicher-Carcano, par le véhicule de Frazier, le 22 (Rappelons que les officiels n’ont eu connaissance du témoignage de Yates que le 26... du moins officiellement, puisque, dans sa première déposition, au bureau du shérif, le jour même de l’assassinat du Président, Frazier parle d’un Oswald transportant, le matin même, un « paquet » – « pack » – dont il ne précise ni la matière, ni la couleur – et lui déclarant qu’il contenait des tringles à rideau, ce que, dans son rapport, le capitaine Fritz confirmera avoir appris, le même jour (sans doute de Mrs Randle), et ce que seront censés corroboré – quoique très douteusement, car pourquoi avoir attendu quatorze ans pour le faire ? – Jarman et Norman, devant le HSCA, en affirmant que, le jour même, Frazier déclara autour de lui qu’Oswald avait apporté un paquet, le matin, dont il pensait, pour l’avoir interrogé sur son contenu, qu’il s’agissait de tringles à rideau, tringles dont Jarman assure qu’elles n’ont jamais été retrouvées, par la suite : aussi, pourquoi parler de tringles à rideau, à toutes ces occasions, si ce n’est peut-être pour répondre à l’obligation d’user d’un thème commun à la déclaration de Yates, dont on peut donc soupçonner que les faits qu’elle relatait ou allait relater étaient connus ? Au demeurant, l’hypothèse que, pour que cette déclaration de Frazier – à supposer qu’elle ne fût pas mensongère – ait pu être faite au shérif, Oswald aurait dû s’être inspiré du transport qu’il avait effectué, deux jours plus tôt, n’a rien d’invraisemblable : en quoi serait infirmé qu’il y eût parasitage du témoignage de Yates par Frazier et/ou des officiels). Cette concurrence de transports fut la raison pour laquelle il fallait discréditer le témoignage de Yates, qui n’apportait que confusion et raison de douter de la version officielle, que celle-ci se fût trouvée ne pas mentir, sur ce point, ou, au contraire, attribuer à Oswald le transport de l’arme qu’un autre que lui-même et Frazier ou qu’un autre que lui-même et Yates aurait eu effectué.

 

 

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